Par Heather Grant, militante des communications marines à l’Ecology Action Center
Édité de son article original sur smallscales.ca
En juillet 2015, le ministère des Pêches et des Océans a fait une annonce importante pour l’indépendance des pêcheurs canadiens et l’économie rurale. L’annonce a introduit une série de nouvelles mesures pour renforcer davantage l’application de la politique du MPO sur la Préservation de l’indépendance de la flottille de pêche côtière dans l’Atlantique canadien (PIFPCCA).
Pourquoi devrions-nous nous préoccuper des flottes de pêche indépendantes (propriétaires-exploitants)? D’abord, parce qu’elles aident à conserver des emplois intéressants dans les communautés côtières. La propriété des permis de pêche et des quotas, et par conséquent les profits, sont de plus en plus concentrés dans les mains de quelques-uns, ce qui signifie que moins de revenus sont répartis dans les communautés qui ont toujours bénéficié de la pêche.
En outre, dans le Canada atlantique, la flotte de propriétaires-exploitants tend à pêcher (mais pas toujours) selon des techniques de pêche ayant un faible impact environnemental, comme la pêche au thon à la canne et au moulinet, les cages à homard et la pêche à l’espadon au harpon. En investissant et en protégeant la pêche à petite échelle, nous pouvons restaurer les écosystèmes océaniques et assurer le maintien des ressources halieutiques pour les générations futures. Greenpeace a produit une infographie utile sur les avantages de la pêche équitables (en anglais).
Il y a un certain nombre de groupes qui se concentrent actuellement sur l’importance de ces pêcheries, tels que le Community Fisheries Network, une coopérative qui aborde le côté social de la pêche, un aspect de plus en plus important de la durabilité dans les pêcheries. Outre-mer, les pays commencent à reconnaître cet aspect social; l’Union européenne a récemment réformé ses règles de pêche pour accorder un traitement préférentiel aux pêcheurs à petite échelle et à faible impact environnemental.
La PIFPCCA a été initialement mise en œuvre en 2007, avec le but de restaurer l’indépendance de ces pêcheurs qui possèdent et exploitent leur entreprise de pêche, et de leur permettre d’être autonomes et économiquement rentables à long terme. De nombreux pêcheurs indépendants avaient perdu le contrôle de leurs entreprises à ce qu’on appelle les « accords de contrôle », qui permettent à des individus ou à des sociétés autres que le titulaire du permis officiel de contrôler la pêche en secret et d’influencer l’utilisation de ce permis. Cela a pour effet d’éliminer discrètement les petites entreprises côtières et d’augmenter tranquillement l’influence des entreprises dans nos pêcheries publiques et en concentrant les permis et les revenus de la pêche, ce qui signifie moins d’argent pour les communautés côtières et de plus grands impacts sur les stocks de poissons.
La PIFPCCA avait initialement prévu d’éliminer et de prévenir de tels arrangements préjudiciables. Les pêcheurs, les entreprises de transformation et autres acteurs impliqués dans les accords de contrôle avaient jusqu’en 2014 pour dénoncer les accords et retourner les permis aux propriétaires-exploitants. Les nouvelles mesures annoncées en juillet par la ministre des Pêches actuelle, Gail Shea, visent à éliminer le reste de ces accords de plusieurs façons. Les titulaires de permis soupçonnés d’être impliqués dans un accord de contrôle seront examinés et tenus de prouver leur statut de pêcheurs indépendants à un comité régional. Le MPO effectuera également des examens de conformité basés sur les risques qui obligeraient les titulaires de permis sélectionnés à prouver qu’ils ne font pas partie d’un accord de contrôle.
Le plus excitant à propos de ces nouvelles mesures, c’est qu’elles sont fondées sur des recommandations qui sont venues directement de l’organisation qui représente les propriétaires-exploitants indépendants. Essentiellement, lorsqu’il est devenu évident en 2014 que certains des grands joueurs ne respectaient pas la PIFPCCA, le ministère des Pêches et des Océans a collaboré avec la Fédération des pêcheurs indépendants du Canada, l’organisme national qui représente les flottes indépendantes, pour travailler à trouver une solution.
Grâce à une série d’ateliers menés par la Fédération, avec la participation directe de hauts fonctionnaires du MPO et des provinces, une série de recommandations a été développée pour façonner les nouvelles mesures. Une collaboration fructueuse entre le gouvernement et l’industrie pour résoudre un problème commun est un événement rare, et les deux méritent d’être félicités pour avoir fait un important pas en avant pour nos pêcheurs indépendants.
La lutte pour garder les bénéfices de la pêche dans les mains de ceux qui pêchent et vivent dans nos communautés de pêche est loin d’être terminée, mais cette ronde a certainement été bénéfique pour les pêcheurs et est un signe prometteur de l’avenir de l’économie rurale, en particulier dans le Canada atlantique.